Un arbre peut-il porter des fruits d'espèces différentes?
Dans ce site, vous découvrirez des centaines de peintures élaborées dans un large éventail d'approches stylistiques, qui ne pourraient, cependant, être d'une personne autre que moi-même. Aucune greffe n'était donc nécessaire: la conviction que l'ancienne norme «un style par artiste» ne doit pas nécessairement s'appliquer en atelier suffit.
En dehors du studio, c’est une autre histoire; cette conviction va à l'encontre des prescriptions des historiens de l'art, des critiques et même des académiciens des beaux-arts. Il jette une clé dans la machine de production de valeur du marché de l'art, un monstre qui se nourrit de l'éthos de l'individualité, qui dépend à son tour de la revendication d'une équivalence empirique entre la signature et le style.
Je soutiens que les traces des corps sont des preuves suffisantes qu’aucun effort biographique, aucune économie psychosociopolitique ne peut en épuiser le sens. Ces traces, parce qu'elles sont les marques laissées par un corps qui, comme tous les corps, est singulier, portent la singularité qu'est le style.
Le style est toujours au cœur de l'expression, et toujours en marge de la compréhension. En revanche, il se prête plutôt bien à un autre type de processus de réflexion spéculatif, plus intuitif celui-là. J'ai inclus, en guise de toile de fond et accompagnant chaque ligne d'investigation stylistique, des réflexions philosophiques poétiques... des "quasi-histoires", si l'on veut. Comme tout produit de l'intuition, elles font métastase de l'orgueil et de l'espoir, c'est-à-dire du désir. En tant que telles, elles peuvent être interprétées comme des symptômes, sachant bien entendu que la pathologie est ici le signe d'une distanciation humoristique, donc critique.